lundi 7 juillet 2008

le globicéphale

Quand j’ai vu ce nom sur la fiche descriptive, face au squelette figé dans les airs, j’ai pensé : bon sang, quel mot fabuleux ! Le globicéphale !

Depuis hier, je l’emploie à la moindre occasion. Regarde, c’est beau comme un globicéphale. Kéké, tu veux jouer au bonhomme globicéphale ? Allez, au bain, petit globicéphale d’amour, envoie des ondes au loin avec ton sonar.

Le globicéphale, ou « dauphin pilote », a une grosse tête globuleuse. En bref, avec son front proéminent plein de graisse, il envoie des bips au loin, qui lui reviennent modifiés en cas d’obstacle. Ce qui compense sa vue déficiente. Ne dit-on pas miro comme un globicéphale ?

Nous sommes allés voir l’exposition « incroyables cétacés » à la Grande Galerie de l'Evolution. Dans une ambiance obscure, parmi le son étrange des baleines tristes, Kéké nous a supplié dès la première minute de rentrer à la maison. Il avait la trouille. C’est vrai que ces grands squelettes de cachalots, suspendus dans les airs, nous toisant comme des fantômes marins, ce n’était pas très rassurant au début.

Les organisateurs d’expositions doivent avoir tous la même formation, nous l’avons noté plusieurs fois : faire en sorte que le visiteur ait envie de se pendre dès la fin de la visite. L’exposition commence sur l’histoire et l’évolution des cétacés, en passant sur leur reproduction, pour finir sur des grandes scènes de chasse à la baleine, de carnage de dauphins au bazooka, de cachalots atomisés avec des cuirassiers Potemkine. Un grand panneau indique la population dérisoire de ces monstres marins. Il en ressort la vague impression gênante que l’homo sapiens est un connard, et qui plus est, un connard efficace.

J’avais eu le même sentiment, après un truc à la Villette, on voyait des rivières tièdes avec des poissons morts, terrassés, la bouche béante, comme s’ils avaient regardé un documentaire animalier pendant quatre heures. Paysages d’usines, civilisation de turbines. On en ressortait dépressif, l’envie de lancer une chaine sur les blogs : suicidons-nous collectivement.

Je me rappelle d’une fille, au lycée, elle militait contre la vivisection, on rigolait. Ah, le second degré ! Je lui disais : miam, j’ai mangé un bon steak de chaton à midi ! Je suis de bonne humeur ! Super ma crème seconde jeunesse à base de gentilles grenouilles ! Plus elle protestait maladroitement, trépignant avec ses petits poings serrés, plus nous répondions des horreurs. Fille du collège, je te le dis, après toutes ses années, pardon, à bas les steaks de chaton, et les globicéphales panés. Pour la peine, quand j'irai au paradis, je chevaucherai des dauphins pilotes, dans la voute céleste, en ton honneur !

Détail incroyable pour moi qui ai la science infuse : j’ai appris un truc. J’étais persuadé que l’histoire de l’évolution, c’était des animaux qui sortaient des mers pour peupler la terre, passant du batracien à la marmotte pour finir dans les transports en commun. La faute au dessin animé « il était une fois l’homme », avec la toccata de Bach, etc. Et bien non ! Les cétacés, ce sont des sortes d’ours avec un gros nez qui sont devenus amphibie, peu à peu. A force de fricoter avec les océans, ils ont fini par perdre leurs pattes arrières. Tiens, c’est une remarque que je pourrai ressortir à un Kéké récalcitrant : « sors du bain, humide progéniture, ou tu vas finir par perdre des pattes arrières ! » Voilà pourquoi, d’ailleurs, les cétacés sont des mammifères ! Ils étaient poilus, avant.

Je me suis senti tellement plus intelligent, après. Presque le melon. A la limite du globicéphale.

La lanterne magique

Quand l'étincelle a disparu, dans cette lanterne magique qu'est la tête, le film du monde est laid. On regarde le soleil qui s'y...