mercredi 28 avril 2010

Rouky

Dans mon immeuble il y a une petite cour, d’à peu prêt 20 mètres carrés, sans compter le local poubelle. Des gens en ont profité pour acheter un chien. Il y a maintenant, entre ces quatre murs pigeonnés, un clebs qui attend. Acheter un chien quand on vit dans un immeuble, cela me parait odieux, cela m'énerve à un point. Les gens de la cour ont un chien et deux enfants. Les enfants sont bien sympathiques, mais un peu stupides (l'ainé me fait : "pan pan pan pan pan pan pan pan pan" pour jouer mais, agacé, je survis ostensiblement) ; reste le chien.

Il est roux, il s'appelle Rouky : c'est un chiot de traineau. Je n'y connais rien en chien, il a une bonne bouille de berger allemand, en plus touffu. Quand il me voit sortir les poubelles, le matin, ou le soir tard, il parait terrassé de joie, il vibre, fait la toupie, la machine à laver, l'atome d'uranium en furie. Je dois être à ses yeux un messie divertissant, il m'accueille avec extase. Il s'enroule autour de mes mollets, je lui écrase deux ou trois pattes malgré moi, mais il est content quand même. Sous mes mains, c'est une boule confuse de muscles et de nerfs, nous disposons de peu de temps, il me fait la fête en accéléré. Il m'attriste un peu, là, désœuvré, enclenché dans une vie terne par le caprice de citadins, au lieu de (est-ce que je sais moi) chasser le zébu ou l'ornithorynque dans les grands espaces, par exemple.

Ce matin, le jeune animal était tellement joyeux en me surprenant jeter les ordures qu'il a tenté de se reproduire avec ma jambe. J’ai dû lui dire : oh hé, calmos, Rouky, quand même. Puis j’ai entrebâillé la porte, je suis sorti de la cour, sauf ma jambe, où le chien restait amoureusement accroché, jambe que j’ai fermement agitée pour me débarrasser du nouvel ami : il faut savoir raison garder, ai-je dit, avant de vérifier mon chaste mollet.

La lanterne magique

Quand l'étincelle a disparu, dans cette lanterne magique qu'est la tête, le film du monde est laid. On regarde le soleil qui s'y...