Hier soir, il pleut comme d'habitude. Je vais faire mes courses au "Champion" à côté de chez moi. Qu'est-ce que je prends me demandez-vous ? Un pack d'eau, des Granolas, de la boite pour les chats, des sacs poubelles, etc. Pas très intéressant, me dites-vous. En fait, vous ne me l'avez même pas demandé, me dites-vous. Attendez un peu !
Je farfouille nerveusement ma "banane" en bandoulière, à la recherche de ma carte "Champion". Ah, la carte des grands magasins ! Celles qui donnent des points ; on ne sait pas trop à quoi ça sert, où çà nous mène, et puis on perd la carte, ou l'on s'aperçoit que les points sont périmés. Mais peut-être qu'au bout, il y a le rêve d'un robot ménager gratuit, voire d'une poêle en inox.
Je joue le jeu. E. nous a pris un lot de trois cartes "Champion" (une pour kéké quand il sera grand), et puis ça me faisait peine, chaque fois que la caissière me demandait "Vouzavélacartchampion" de répondre "non", comme si je méprisais les choses de ce monde, et que j'étais bien trop malin pour tout ça. Là, je réponds "oui !", je me sens du cru, regard complice. Et puis parfois on ne me demande même pas ma carte d'identité quand je fais un chèque, c'est fou, c'est très village, très familial.
Je trouve ma petite carte, et devant, moi un grand gaillard se retourne pour me regarder : Olivier Besancenot. Oh, tiens, il fait ses courses au "Champion" du boulevard Barbès, lui ! Attention, ce n'est pas une blague, comme quand je raconte que je suis en cellule de dégrisement avec Villepin. Non, non, c'est bien le candidat à la dernière présidentielle qui se tient devant moi.
Et qu'est-ce qu'il a dans son caddy, hein ? Là, du coup, ça vous intéresse... Si je vous déballe qu'il a quatre bouteilles de whisky, huit boites de préservatifs, le dernier livre de Sarkozy, plus "le Bonzaï pour les nuls", plus une boite à "thé à l'orange spécial constipation chronique", là ça vous parle, hein ?
Non, en fait. Le truc qui m'interpelle, c'est la Pizza de marque "Champion". Des courses de trotskyste, quoi.
Je suis étonné par sa stature : à force de voir son visage de tintin communiste sur les affiches, ses traits poupins, à cause de sa relative jeunesse (comparée aux briscards politiques), on s'attendrait presque à voir un petit garçon, avec un pantalon court, des grandes chaussettes, une tétine. Non, le gars me dépasse, et pourtant je suis grand. En plus, il a l'air baraqué, tendance "j'écoute de la musique punk".
Je me dis : "Oh c'est drôle, la caissière va lui demander s'il a sa carte Champion, et moi, je vais savoir !". Ca ne loupe pas :
"Vouzavélacartechampion ?
- Non."
Je sais, à présent. Et ben, Olivier, ça vous intéresse pas les robots gratuits, voire les poêles en inox ? Tant pis, c'est mon tour, moi j'ai la carte Champion, j'espère que la caissière va m'aimer, qu'elle va me dire : "Vous au moins, vous n'êtes pas un pipole de la télévision, mais on peut compter sur vous. Vous êtes un gars du cru, un indigène. Vous l'avez, la carte Champion."
A la sortie du supermarché, je glisse aussitôt sur une dalle humide et lisse, et je me retrouve par terre. Un clochard me dit : "c'est la troisième fois que ça arrive ce soir ! Je l'ai pourtant dit au vigile, ça glisse, il faut nettoyer !". On discute un peu, scandalisés par la marche du monde, et je m'en vais.
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