dimanche 7 juin 2009

L'Immanquable

(où je ne me rappelle plus comment la conversation en est arrivée là).

La méchante : Si ça continue, je vais me faire enlever l'hémisphère droite.

Le gentil : Peuh, on dit l'hémisphère droit, ignare.

La méchante : ?!, tu en es sûr ?

Le gentil, triomphant : Bien évidemment. Ne dit-on pas "l'Hémisphère Nord ?".

La méchante : Ah parce que sinon, on dirait "l'Hémisphère Norde ?". Ah ah.

Le gentil : (...)



(Où seul face au but après avoir effacé le dernier défenseur, le gentil manque l'immanquable et tire au dessus de la barre)

jeudi 4 juin 2009

Bouquet dégarni

La coiffeuse me ratiboise. Je me regarde, elle y met du sien, j’essaye de me trouver beau, pour lui faire plaisir.

A côté, un type très propre, très sympathique, déclare qu’il a cessé de travailler jusqu’à trois heures du matin, parce que ça ne servait à rien. Il a des chaussures en cuir très classe. Il raconte l'enterrement de vie de garçon d’un ami. Il dit que c’était très bien, très correct, peut-être qu’ils se sont murgés proprement. Il raconte aussi que le futur marié était déguisé en je sais plus quoi, avec des habits roses. Ça devait être super marrant, j’imagine.

Je suis en face de moi, un miroir considérable. Je suis mon propre éléphant dans le couloir, impossible de me rater. Un souvenir me revient, enfant chez le coiffeur : je me dévisageais en pensant que c’était étrange d’être soi même, d’être borné par soi même, comme un enclos. Un tout petit territoire humain, avec des haies, on y broute dedans, on n’en sort jamais.

Il parait, dis-je avant de partir, que je me dégarnis, au sommet du crâne. Elle fait la moue et dit : oui, ça commence. Un conseil : un léger massage tous les jours, sur le cuir chevelu. Comme ça. Là. Je pense alors : on est pas obligé de dire la vérité, non plus.

mercredi 3 juin 2009

Bazar

Au Jardin d’Acclimatation, un orchestre joue la musique de la Soupe aux Choux, façon big band de Charles Mingus. Ils sont en short. En guise d’uniforme, ils portent un ou deux vêtements orange ; une écharpe, un slip, des chaussettes, un mouchoir qui dépasse, ça crée un lien mou entre eux. A un moment, ils font un pont musical : le fameux glouloulouglouloubloulouloulouloullou de la Denrée, avec la main qui dégouline de la bouche. Les enfants les prennent pour des tarés, c’est qu’ils n’ont pas vu la Soupe aux Choux, eux.

Parfois, les musiciens font des fausses notes, des couacs, des pains ; une vraie boulangerie. Mais ils s’en tamponnent royalement. C'est une boulangerie cool. Le chef fait un signe, et tout le monde commence à improviser, en même temps ; ils quittent les rangs, leur pupitre, s’en vont marcher au hasard. Ils cheminent parmi les gens, approchent le cornet des poussettes, stupéfient les bébés, leurs yeux de bille exorbités. Les voilà bien épars, carrément en balade, saxophone, picolo, trombone, clairon. L'orchestre s’est disloqué. Il ne reste qu’une section rythmique, toute nue, ruinée, qui fait la permanence dans la pelouse déserte. Les enfants suivent certains souffleurs, ceux qui font des gros pouets pouets. Ils sautillent, charmés, comme les petits habitants de Hamelin.

Sonne le rassemblement des musiciens égayés dans la verdure, une fontaine glauque ou un château de miroirs déformants. Le chef compte à rebours les mesures, avec ses doigts, quatre, les voilà réunis, trois, on se gratte l'entrejambe une dernière fois, deux, on baye, un, on regarde la partition qui est à l'envers, en fait, zéro on expose une dernière fois le thème. Les voir exister me remplit d’aise. Jouer dans un orchestre, en sandale, l’été, juste avant l’apéro, c'est vraiment une très bonne place.

mardi 2 juin 2009

Square

Une toute petite fille d’environ soixante-dix centimètres de haut. Un gros ballon. La petite fille veut donner un coup de pied dans le ballon. Elle titube, rate, ce n’est pas le ballon qui décolle, mais elle-même. Elle s’est bien viandée, stupéfaite, elle agite ses membres en l’air comme un petit scarabée.

Elle recommence à plusieurs reprises. A chaque fois, le ballon reste immobile, impérial, indéboulonnable. La petite fille, elle, se vautre différemment, se croûte, s’étale dans tous les sens. Des dames assises sur le banc rigolent bien, on échange des regards, complices, hilares. On l’encourage à recommencer souvent.

Une maman vient alors à la rescousse de la petite créature. Elle la retire de ce plaisant croutodrôme et va ranger la poussiéreuse dans sa nacelle. Un murmure de déception parcourt l’assemblée.

La lanterne magique

Quand l'étincelle a disparu, dans cette lanterne magique qu'est la tête, le film du monde est laid. On regarde le soleil qui s'y...