Du haut de ses 80 centimètres, Kéké aime se lancer dans des longues tirades. Il s'empoigne les mains, lève la tête, se concentre, et lâche des syllabes étranges, avec un air interrogateur.
Son vocabulaire s'est élargi. Au début, "caca", ne signifiait qu'une seule chose : le chat, qui s'appelle "Rasskasse". Maintenant, cela signifie "cabane", "cassé", "camion". Son vocabulaire s'étend, mais de façon homonymique, si l'on veut. S'il veut souligner ce qu'il dit, il emploie plutôt "cacaca", varie selon l'intensité. Exemple : la gâteau est vraiment cassé, le téléphone portable est vraiment trempé dans le bol de café : "cacacaca ?" C'est un langage, c'est du kéké.
Au début, c'était simple. "Této", c'est pour téter, "papa, maman", ses parents. "apan ?", c'est la plante. Mais maintenant, les mots sortent en cascade, il emploie des termes alambiqués, et nous restons devant lui, perplexe comme des touristes égarés dans un pays étranger.
Et puis il y a Coum-coum. On ne sait pas qui c'est. On en l'a pas encore identifié.
Quand on se concentre, d'habitude, on arrive toujours à savoir. "oh non ! cacaca !". On trouve au bout d'un moment que la benne de son camion est déboîtée. Alors c'est la séquence : papa est un héros, il sait réparer les camions, il s'approche de Dieu niveau savoir-faire.
Kéké aime énumérer. A la maison, qui retrouvera-t-on, je lui demande ?
"Maman ?
- Oui, maman.
- Papa ?
- Oui, j'y serai aussi.
- Caca ?
- Oui, Raskasse, le camion, la cabane, le café, etc.
- Wouh-wouh ?
- Oui, le chien en peluche.
- Coum-Coum ?
- ... c'est qui Coum-coum ?
- Coum-Coum."
Plus tard, la question me trottine toujours en tête, avec ma compagne, on repart à la charge: "Alors Coum-coum ?" Il s'anime, il est content. On lui montre des tas d'objets, des endroits, des peluches, sans succès. C'est un sorte de spectre ? Les parents se regardent, sourient, nous comprenons que des choses nous dépassent, et qu'il va falloir s'habituer à être bien souvent dépassé.
On se couche, c'est la nuit. "Coum-coum ?" je lui dit. Il sourit, on s'est compris. "Coum-Coum ! " me répond-il.
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