A midi, il fait froid, mais j'ai envie de manger dehors, dans un square. Je suis têtu. J'aime la nature, bon sang de bon soir. Tout seul, sur un banc humide, dans le square désert, mais d'un vert profond chargé de pluie, je mange mes sandwiches. Devant moi, quelques moineaux s'agglutinent. Bientôt, il y en a au moins quarante. Ils sont disposés en demi cercle comme dans un amphithéâtre, ils piaillent. Il y en a vraiment beaucoup. Je me sens oppressé. Et si je contractais une sorte de phobie, ne serait-ce pas idiot ? Pour la première fois de ma vie, des moineaux m'inquiètent. Je comprends le film d'Hitchcock.
Une miette tombe, certains se ruent sur mes pieds. Et si c'était les araignées ou les blattes qui se comportaient ainsi, se regroupant au pieds des gens, dans les squares, sans vergogne ? La vie serait invivable. Puis ils s'en vont, petit à petit. Restent deux moineaux collés l'un contre l'autre, avec l'espoir que, dans un geste fou, je balance ma pitance comme des confettis, en chantant à tue-tête. Leur deux corps ronds de plumes semblent former un huit, ils piaillent à tour de rôle, temps fort, temps faible. Ils auraient été humains, on les aurait trouvé à la sortie des artistes, tard dans la nuit, pour capter l'autographe d'un acteur ténébreux. Puis je m'en vais. Des moineaux se roulent sur la pelouse interdite, comme des chevaux sauvages obèses. Je retourne travailler, frigorifié. Foutu nature, toi et ta lourde verdure.
lundi 28 mai 2007
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