vendredi 28 septembre 2007

Les molécules de l'enfer

Le dentiste, très dandy.

Un Dandyste.

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Sympathique, le médecin accepte ce rendez-vous à l'improviste. J'entends dans le couloir quelque chose comme : "l'urgence est arrivée ?". Voilà qui est très classe pour me définir. Une urgence. Oui, je suis une sorte de James Dean de la molaire, un James Dent. C'est la devise de mes dents : vivre vite, se dévitaliser rapidement, faire un beau plombage.

Il note mon numéro de téléphone, il est estomaqué de l'entendre débuter par "09 ..." Non, je n'habite pas dans un service après-vente, c'est un numéro de chez free, oui répond-il, comme son fils qui a lui aussi un numéro bizarre, un numéro "groupé".

Nous discutons de free. Il me demande, intéressé : "vous en pensez quoi ?" Je crois que c'est la première fois de ma vie qu'un médecin me demande mon avis.

Il hésite à me donner des antibiotiques. Dix ans que je prends de l'homéopathie, que j'applaudis des deux mains les campagnes "les antibiotiques c'est pas automatique", car les petits microbes soulèvent la pénicilline comme de la fonte, ce qui muscle leur petits bras ; mais là au diable les granules d'eau dilué dans des solutions aqueuses, vive les antibiotiques, vive l'uranium, vive les 4x4, donnez moi un truc surtout pas bio, de l'insecticide dentaire, faites moi sauter cette infection.

Radio des dents. Il place ma tête dans une sorte de guillotine magnétique. Il y a des panneaux "jaunes radioactifs" partout, la machine vrombit, le dentiste part en courant tandis qu'un compte à rebours signale que je vais être téléporté, comme dans Star Trek. Je me retrouve seul dans une grande pièce, la tête branchée au plafond comme si j'étais une grosse clef USB, et mon crâne est entièrement scanné.

Surtout ne pas bouger, m'a-t-il dit. Pourquoi bougerais-je ? Soudain, ça me démange. L'oeil me gratte. L'épaule aussi. Le nez. Voilà, mon esprit a entièrement été téléchargé par l'appareil nucléaire. Après, vous m'en raconterez, des histoires de iPhone.

Je retourne au travail, où plein de gens usent leur jeunesse pour la sortie du nouveau site. Si nous étions des caméléons, notre peau prendrait une teinte de fond d'écran.

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Le panier plein de médicaments, comme un enfant dans la nuit d'Halloween, je sens la douleur me quitter. J'aimerais pouvoir ranger mes dents comme dans une boite à outils. Ah, quand la douleur disparaît, comme cela me parait vrai et beau, cette définition du bonheur d'un certain grec qui aimait les piqûres : l'absence de douleur pour le corps, l'absence de trouble pour l'âme.

La lanterne magique

Quand l'étincelle a disparu, dans cette lanterne magique qu'est la tête, le film du monde est laid. On regarde le soleil qui s'y...